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don traduit : peut-être était-il offensé et n’en mettait-il que plus de soin à cacher sa colère. Cela paraît plus conforme au texte littéral, incertum an offensus ; cependant comme le mot incertum peut aussi absolument se rapporter à Tibère, j’ai cru devoir adopter l’autre sens, qui est à la vérité un peu plus affirmatif, mais qui se lie mieux avec ce qui précède et avec ce qui suit. 1°. Tacite a dit plus haut, que Tibère cherchait à cacher son état de défaillance. Il devait donc naturellement être offensé de ce que son médecin avait cherché à s’en assurer en lui tâtant le pouls, car il s’en aperçut, neque fefellit ; et Tacite nous dit ailleurs que Tibère trouvait très-mauvais qu’on soulevât le masque dont il se couvrait. 2°. Tibère reste à table plus long-temps qu’à l’ordinaire, comme par égard, dit Tacite, pour le médecin Cariclès, son ami, qui allait le quitter ; c’était donc pour cacher son ressentiment : autrement Tacite aurait dit que Tibère resta long-temps à table pour faire croire qu’il se portait bien. Voilà les raisons qui m’ont déterminé, et que je soumets au jugement du lecteur.

(96). Elle prie qu’on appelle Narcisse ; cieri Narcissum postulat. Gordon fait rapporter postulat à l’empereur même, mais sans aucune raison, ce me semble ; ce postulat, par la construction de la phrase, se rapporte naturellement à Calpurnia : d’ailleurs s’il s’agissait de l’empereur, Tacite aurait mis jubet.

(97). Quelle pouvait jouir de tout ; frueretur imo iis : je rapporte ces mots à Messaline, d’autres les rapportent à Silius ; les mots adulteria au pluriel, objecturum et reposceret m’ont déterminé pour le premier sens. Il me semble que, s’il n’eût été question que de Silius, Tacite aurait dit adulterium, et que le mot adulteria désigne les adultères passés et présens de l’impératrice ; adultères que Narcisse ne voulait pas, disait-il, lui reprocher, nec nunc objecturum, de crainte que l’empereur, son mari, ne lui redemandât tout ce qu’il lui avait donné, ne reposceret.

(98). Branlait la tête, jacere caput. D’autres traduisent battre la mesure. Il me semble que le mot jacere indique le premier sens, d’autant plus que les Bacchantes, que Messaline et Silius voulaient imiter dans cette partie de débauche, faisaient ce mouvement dans leurs orgies.

(99). Quoique la disgrâce lui eût troublé la tête ; quamquam res adversa consilium adimerent. Ce qui peut aussi s’entendre en général du caractère de Messaline, et signifier qu’elle n’avait point de tête dans le malheur : cependant il m’a paru plus naturel d’entendre ces mots de la situation présente de Messaline, et d’y restreindre le sens. On peut traduire aussi la privât de conseil, car ici le mot consilium est susceptible de ces deux acceptions.

(100). Penchait vers la clémence ; le texte, pronum ad misericor-