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ce qui serait plus énergique et moins rapide, le droit sacré des ambassadeurs, celui des nations, celui même des ennemis : mais la nouvelle manière dont nous traduisons ici, nous paraît encore plus précise et plus rigoureusement conforme au sens de l’auteur. Divus Julius… divus Augustus. Nous ne pourrions rendre en notre langue le mot divus que par une périphrase. Il signifie reçu parmi les dieux, mis au rang des dieux ; et cette périphrase, surtout étant répétée presque deux fois de suite, énerverait entièrement la traduction. Le mot divin ne suffirait pas, et serait d’ailleurs équivoque, ce mot s’appliquant, en notre langue, à toutes les personnes ou à toutes les choses dont on veut louer l’excellence. Cependant j’ai traduit un peu plus bas, tua, dive Auguste, cælo recepta mens, par votre âme qui habite des cieux, ô divin Auguste ! parce qu’il me semble qu’en cet endroit le sens du mot divin est déterminé par les mots qui précèdent, et qui rappellent l’apothéose d’Auguste.

(25). Qu’en ce lieu seul on massacre les centurions, etc. ; hîc tantum interfici centuriones, etc. D’autres traducteurs ont donné à ce passage un sens différent : Qu’on ne fait ici que massacrer les centurions, etc. J’avoue que je ne puis être de leur avis. Un journaliste très-éclairé, qui d’abord n’avait pas pensé comme moi, est revenu ensuite à ma traduction : voici les raisons qui l’y ont déterminé ; raisons qu’il a pris la peine de m’écrire, et auxquelles je n’ai rien à ajouter. « Indépendamment, dit-il, de cette nuance qui est dans votre sens : ce n’est plus dans les combats que périssent les centurions, ce n’est plus qu’ici, ce n’est plus que dans le camp même qu’on les massacre, etc. ; j’y vois encore celle-ci, que vous ne désavouerez pas, à ce que je crois : Mon père reçoit d’heureuses nouvelles de toutes les provinces, ce n’est qu’ici, ce n’est que dans l’armée commandée par son fils qu’on massacre les centurions, etc. Cela tient à tout dans le texte ; d’abord cela tient intimement au læta omnia aliis e provinciis audienti. De plus, cela est préparé par le trait de Jules-César, par celui d’Auguste, par le nos… ex illis ortos, par le si Hispaniæ Syriæve miles, par le illa signis a Tiberio acceptis, tu tot præliorum socia, tot prœmiis aucta ; cela est encore confirmé après coup par le meque precariam animam inter infensos trahere. Toutes ces horreurs sont donc uniquement réservées à Germanicus, au fils de Drusus, au fils adoptif de Tibère ? Ce sens est beaucoup plus beau et plus juste que celui auquel vous le préférez. »

(26). Et que je traîne ici ma vie à la merci des factieux. Neque precariam animam inter infensos trahere : littéralement, et que je traîne ici moi-même une vie précaire au milieu de mes ennemis. C’est ainsi que j’avais traduit dans les éditions précédentes ; et de bons juges avaient approuvé cette phrase. La seule objection dont elle est susceptible, c’est que le mot précaire ayant différentes significations (voyez le Dictionnaire de l’Académie Française) n’est peut-être,