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SUR L’INOCULATION.

soft même inoculée, ne doit point être calculée d’après les registres des hôpitaux, qui la donneraient trop forte ; attendu que dans les hôpitaux les maladies sont beaucoup plus funestes qu’ailleurs, par mille raisons, et que même certaines maladies, comme les blessures à la tête, y sont presque toujours mortelles, tandis qu’ailleurs on en guérit presque toujours ; selon M. Jurin, la mortalité générale, causée par toutes les maladies, est plus grande de trois septièmes dans les hôpitaux que dans les autres lieux. Au reste, plus la petite vérole sera bénigne dans un lieu donné, plus aussi, selon nos médecins, l’inoculation le doit être ; ainsi la raison de la pratiquer sera toujours égale, dans les lieux même oiz la petite vérole est moins à craindre.

V. On assure dans le mémoire que les accidens sont beaucoup moins communs à la suite de l’inoculation que de la petite vérole naturelle, et que ces accidens viennent presque toujours de la faute de l’opérateur ; on ne convient pas même, quoi qu’en dise M. Pringle, d’ailleurs favorable à l’inoculation, que cette maladie ait une incommodité qui lui soit propre, l’abcès des glandes axillaires.

VI. Nos médecins iuoculistes ne croient pas qu’il soit facile de communiquer d’autres maladies par l’inoculation. L’observation fait voir, selon eux, que rarement deux levains différens existent ensemble dans le même corps sans que l’un détruise l’autre ; quelques faits recueillis de ce qui s’est passé durant la dernière peste de Marseille, semblent, disent-ils, favoriser cette assertion. Ils accordent pourtant qu’il est possible que, par une méprise dans le choix du virus variolique, on insère avec la petite vérole d’autres maladies, quoique de très-grands inoculateurs en doutent, et qu’il y ait même des faits qui semblent prouver le contraire.

VII. Selon ces médecins, l’inoculation doit diminuer la contagion, parce que la matière variolique est beaucoup moins abondante dans les inoculés, et la fièvre beaucoup moins forte ; ils prétendent que six petites véroles artificielles produiront à peine autant d’effet pour la contagion qu’une seule petite vérole naturelle. D’ailleurs si on inocule les enfans en nourrice, et par conséquent à la campagne pour la plupart, la contagion se répandra encore moins dans les villes ; et même, après quelques générations, le nombre des petites véroles pourra diminuer à tel point, qu’il n’y aurait plus de personnes sujettes à cette maladie, que celles qui devraient l’avoir deux fois. On nie formellement dans le mémoire que l’épidémie de la petite vérole à Paris ait augmenté depuis l’inoculation. On remarque que l’épidémie de Boston avait commencé au mois de mai, et qu’on