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RÉFLEXIONS

à l’inoculation la mort d’un inoculé, s’il périssait dans le cours de l’opération par une maladie, qui, examinée sans prévention, parût n’avoir aucun rapport à l’insertion de la petite vérole, d’une fluxion de poitrine, par exemple, que mille causes étrangères à cette insertion peuvent occasioner.

Mais encore une fois, ce qui serait à désirer là-dessus, et par malheur ce dont on n’ose guère se flatter, c’est que tous les partisans et les adversaires de l’inoculation voulussent bien agir et parler avec toute la bonne foi possible, soit dans leurs observations, soit dans leurs pratiques, soit dans leurs écrits.

En attendant qu’ils s’accordent à ce sujet, il nous paraît qu’il n’y a jusqu’à présent nulle preuve sufïisante, qu’aucun malade, sagement inoculé, ait perdu la vie ; nous espérons n’être pas désavoués dans cette assertion par ceux même des partisans de l’inoculation qui conviennent qu’on peut en mourir, puisque, jusqu’à présent, toutes les fois qu’on leur a opposé quelque mort causée par l’inoculation, ou ils ont nié le fait, ou ils l’ont attribué à une autre cause, ou ils ont dit que l’inoculation n’avait pas été donnée avec les précautions convenables.

Ainsi tous ceux qui ont à craindre la petite vérole naturelle feront bien, je crois, d’éviter ce danger, en le prévenant, lorsque rien ne s’y opposera, par une maladie qui ne doit leur laisser rien à craindre, s’ils ont soin d’en confier le traitement à un inoculateur prudent et expérimenté.

Mais, dira-t-on, s’il arrivait enfin, car la chose n’est pas démontrée impossible, qu’une personne inoculée avec les précautions convenables en fut la victime, quel parti prendriez-vous ? Celui que j’ai déjà indiqué ci-dessus dans l’hypothèse que l’inoculation puisse causer la mort : je ne voudrais ni conseiller à personne de se faire inoculer, ni en dissuader personne.

§ III. Si l’inoculation garantit de la petite vérole naturelle.

En admettant, comme nous l’avons fait, que l’inoculation ne mette point la vie en danger, les avantages de cette opération ne seront pleinement incontestables que dans les deux autres suppositions que nous avons faites, et qui nous restent à examiner, 1o. Que l’inoculation garantisse de la petite vérole naturelle ; 2o. que l’inoculation augmente la vie moyenne des hommes.

Les observations rapportées par les inoculateurs paraissent jusqu’ici très-favorables à la première supposition. On n’a point encore, selon eux, un seul exemple incontestable d’un inoculé sur qui l’opération ait réussi, et qui ait repris la petite vérole ; il