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RÉFLEXIONS

lens de la ville ; sans que je pre’tende néanmoins qu’elle ne puisse aussi être utile aux autres états, comme je le dirai dans la suite.

§ X. Du danger plus ou moins grand de la petite vérole suivant les âges.

À ces considérations sur le danger plus ou moins grand de la petite vérole relativement aux lieux, ajoutons-en une autre relativement à l’âge. Le calcul que nous avons fait plus haut, sur le risque d’avoir la petite vérole et d’y succomber, risque que nous avons évalué à 1 sur 3000, a l’inconvénient d’être trop vague, étant appliqué à tous les âges pris indistinctement. Il est certain, en premier lieu, que le danger d’avoir la petite vérole n’est pas le même pour tous les âges, car plus on approche de la vieillesse, plus ce danger diminue ; secondement, que le danger d’en mourir n’est pas non plus le même pour tous les âges, puisqu’on en réchappe bien plus aisément dans l’enfance que dans la vigueur de la jeunesse. On est donc bien loin de connaître la valeur, même approchée, du danger qu’on court à chaque âge de mourir de la petite vérole naturelle dans le mois, danger que nous avons exprimé en gros par le rapport de 1 à 3000 pour tous les âges pris ensemble. Cependant il serait très-nécessaire de savoir, et quelle est la valeur précise de ce danger pour chaque âge, et quel est, pour chaque âge aussi, le risque qu’on court en se faisant inoculer : les faits nous manquent, au moins jusqu’ici, pour pouvoir apprécier ces deux risques ; c’est pour cette raison sans doute que plusieurs partisans très-déclarés de l’inoculation, surtout parmi ceux qui ont passé 40 ans, ne jugent point à propos de courir ce risque pour eux-mêmes, parce qu’ils ignorent à quoi ils s’exposent d’un côté, et ce qu’ils gagneraient de l’autre : chacun veut voir clair au jeu qu’il joue.

§ XI. Examen de quelques autres raisonnemens peu concluans en faiseur de la petite vérole inoculée.

Quelques partisans de l’inoculation ont prétendu que celui qui attend la petite vérole, à quelque âge que ce soit, risque presque autant d’en mourir que celui qui l’a déjà, par la grande probabilité qu’il y a, selon eux, qu’on sera un jour attaqué de cette maladie : d’où ils concluent qu’à quelque âge que ce soit, celui qui ne se fait pas inoculer calcule très-mal.

Ce raisonnement porte sur plusieurs suppositions, les unes gratuites, les autres peu concluantes. D’abord on ne sait pas