Page:D’Alembert - Œuvres complètes, éd. Belin, I.djvu/507

Cette page n’a pas encore été corrigée


AVERTISSEMENT

Une partie de l’ouvrage suivant a été lue à l’Académie royale des sciences de Paris en 1760, et imprimée depuis en différens endroits ; on le redonne aujourd’hui entier, avec beaucoup d’additions qui en font comme un nouvel ouvrage. Les circonstances ont paru favorables à l’auteur pour soumettre ses réflexions au jugement du public. La question sur l’inoculation est plus débattue en France que jamais ; elle est même devenue une affaire de parti, et l’objet d’une dispute presque aussi violente que l’ont été le jansénisme et les bouffons. Il est vrai, et c’est un aveu que nous devons faire pour cette fois à l’honneur de la nation française, que le nouvel objet pour lequel elle se passionne aujourd’hui est un peu plus important que beaucoup d’autres qui l’ont si souvent agitée : aussi les brochures, les personnalités, les accusations de mauvaise foi sont-elles prodiguées dans les deux partis ; les adversaires de l’inoculation appellent ses partisans meurtriers, ceux-ci traitent leurs antagonistes de mauvais citoyens ; peu s’en est fallu même, à ce qu’on assure, que cette querelle n’ait abouti entre les plus graves docteurs à des suites sanglantes, qui auraient obligé la médecine d’appeler la chirurgie à sn secours.

On a tâché dans cet écrit de ne dire d’injures à personne ; de prouver que l’inoculation a été mal défendue à certains égards, et plus mal attaquée à beaucoup d’autres 5 que si cette opération est avantageuse, c’est par des raisons que ses partisans n’ont peut-être pas fait assez valoir, et non par celles sur lesquelles ils paraissent avoir appuyé le plus.

L’auteur, dans le quatrième volume de ses Opuscules mathématiques, propose à l’examen des savans plusieurs autres considérations analytiques sur les calculs relatifs à l’inoculation ; il se borne ici aux raisonnemens qu’il a cru pouvoir mettre à la portée de tout le monde, parce que, dans une matière si intéressante pour tous les citoyens, il désire de les avoir tous pour lecteurs et pour juges ; il le souhaite d’autant plus qu’il ne peut se flatter d’obtenir grâce devant ceux qui ont porté le zèle à l’excès pour ou contre l’inoculation : peut-être sera-ce une marque qu’il a attrapé ce juste milieu oii la vérité se trouve souvent dans les contestations qui partagent des hommes éclairés ; c’est là que le public impartial revient enfin pour l’ordinaire, après de longues et violentes secousses.

De très-grands géomètres ont paru porter un jugement favorable sur la manière dont l’auteur de cet écrit a discuté la question ; d’autres, intéressés peut-être a n’en pas juger de même, pourront trouver ses raisons peu concluantes, soit contre les partisans, soit contre les adversaires de la petite vérole artificielle. Si elles sont attaquées par des écrivains dont l’autorité en mathématique soit de quelque poids, ce