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SUR LA PRÉCESSION DES ÉQUINOXES.

Tel est le plan et l’objet de cet ouvrage ; et telle est la méthode que je me propose de suivre, en comparant avec le système nevrtonien les autres phénomènes célestes. C’est par un semblable examen, par une analyse rigoureuse, qu’il faut juger l’attraction, et non par des raisonnemens métaphysiques aussi peu propres à détruire une hypothèse qu’à l’établir. Il ne suffit pas à un système de satisfaire aux phénomènes en gros et d’une manière vague, ni même de fournir des explications assez plausibles de quelques uns : les détails et les calculs précis en sont la pierre de touche ; eux seuls peuvent apprendre s’il faut adopter une hypothèse, îâ rejeter, ou la modifier. Si parmi les phénomènes que nous connaissons, ou parmi ceux que nous découvrirons dans la suite, il s’en trouve quelques uns de con-’traires à l’attraction, nos géomètres en seront plus embarrassés, et nos métaphysiciens plus à leur aise. Mais, s’ils décidaient en sa faveur, il faudrait bien prendre le parti de l’admettre, fut-on forcé de reconnaître une nouvelle propriété dans la matière, et dût-on se résoudre à n’avoir pas une idée plus nette de la vertu par laquelle les corps s’attirent, que de celle par laquelle ils se choquent.

Je ne dirai rien ici de l’explication que fournissent les tourbillons cartésiens de la précession des équinoxes. L’examen de cette explication n’est point du ressort de cet ouvrage, et serait d’ailleurs hors de saison, dans un temps où les hypothèses et les conjectures vagues paraissent enfin bannies de la physique. Le système de Descartes n’a été, si on peut parler ainsi, qu’un feu passager ; mais c’est un feu qui a brillé dans la nuit la plus profonde, et à cet égard il doit être regardé comme un monument du génie de son inventeur. Les sciences et l’esprit humain ont les plus grandes obligations à ce philosophe ; ses erreurs même étaient au-dessus de son siècle, et n’ont été que trop longtemps au-dessus du nôtre ; mais ses intérêts sont fort différens de ceux des sectateurs qui lui restent.