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DES ÉQUINOXES.

que le mouvement de cette masse ne sera pas le même, que si elle était répandue sur toute la longueur du levier. La raison en est évidente, c’est que le bras de levier, par lequel chaque particule est poussée, se trouve différent dans les deux cas.

Enfin Newton tombe encore, si je ne me trompe, dans une autre méprise, par la façon dont il partage entre le globe et l’anneau, le mouvement que l’anneau devrait avoir s’il était isolé et non adhérent au globe. En corrigeant le principe dont il se sert pour faire cette distribution, et dont il serait difficile de donner ici l’idée, on voit que l’action seule du soleil devrait produire un mouvement annuel de 12″ dans les points équinoxiaux ; de sorte qu’en admettant même toutes les autres hypothèses dont nous croyons avoir montré l’insuffisance ou le peu de fondement, la précession des équinoxes devrait être, suivant la théorie de Newton, d’environ 10″ plus grande que ne la donnent les observations : différence qui n’aurait pas échappé aux astronomes.

Mais cette différence même quoique assez sensible, est cependant bien plus petite que celle qu’on devrait trouver réellement, en faisant entrer dans le calcul toutes les circonstances néceisaires. Car le mouvement de rotation de la terre autour de son axe, auquel Newton ne paraît pas faire toute l’attention convenable, et qui se combine avec toute l’action du soleil etde la lune, doit, toutes choses d’ailleurs égales, influer pour beaucoup sur la quantité de la précession ; et je crois avoir démontré dans cet ouvrage, que si l’on a égard à ce mouvement, et que l’on combine avec exactitude toutes les forces qui agissent sur notre globe, le mouvement des points équinoxiaux se trouvera de 23 à 24″, en faisant abstraction de la lune, et en regardant la terre comme sphéroïde homogène ; résultat qui serait sans doute très-contraire à l’attraction, si le rapport des axes de la terre et celui des deux forces étaient tels que Newton le suppose.

L’accord apparent des calculs de ce grand géomètre avec les observations, ne paraît donc pas aussi favorable à l’attraction qu’on aurait pu le croire. Cependant il serait injuste d’attribuer à ce système, sans autre examen, un défaut qui, supposé qu’il soit réel, n’est peut-être que dans les principes et les suppositions dont l’auteur s’est servi. D’ailleurs, est-il surprenant qu’un philosophe à qui nous devons un si grand nombre de découvertes, ait laissé quelques pas à faire dans la carrière immense oii il a tant avancé ? et pouvons-nous nous glorifier, si, instruits comme nous le sommes par des observations dont il n’a pu avoir le secours, et aidés par une analyse que nous tenons de lui presque toute entière, nous nous trouvons en état d’ajouter quelque chose à l’édifice qu’il a si prodigieusement élevé ? C’est d’après ces réflexions