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SUR LA PRÉCESSION

phénomènes tels qu’ils doivent être dans le système de l’attraction ; il n’y aura plus qu’à les comparer avec les phénomènes réels pour juger de l’autorité que ce système doit avoir dans l’astronomie physique.

Quoique l’examen de cette importante question renferme de grandes difficultés de calcul, peut-être touchons-nous au moment de sa décision : la perfection à laquelle l’analyse s’élève de jour en jour, nous donne lieu de l’espérer. Ce sera du moins contribuer à l’avancement des sciences, que de remplir quelque partie d’un si grand objet. Animé par ce motif, j’ai entrepris de discuter dans cet ouvrage les moyens que l’attraction peut fournir d’expliquer un des principaux phénomènes célestes.

Pour peu qu’on ait de connaissances dans l’astronomie, on sait que la sphère des étoiles paraît se mouvoir d’occident en orient autour des pôles de l’écliptique d’un mouvement très-lent, qui, suivant les observations des astronomes, est d’environ 50 secondes chaque année. Cette apparence vient d’un mouvement réel de Taxe de la terre autour des pôles de l’écliptique, en conséquence duquel les points équinoxiaux, c’est-à-dire les points oii l’écliptique et l’équateur se coupent, changent continuellement de place, et rétrogradent chaque année d’orient en occident d’environ 50 secondes. La rétrogradation de ces points a été nommée précession des équinoxes[1]. Mais quelle est la cause d’un mouvement si singulier dans l’axe de la terre ? l’attraction peut-elle en rendre raison ? c’est ce que je me suis proposé d’examiner.

Newton, qui n’a presque rien hasardé, et que par cette raison nos systématiques n’ont pas mis au rang des philosophes, paraît n’avoir pas porté dans l’explication de ce phénomène la lumière qu’il a répandue sur tant d’autres. Il trouve, à la vérité, par une méthode dont on ne saurait trop admirer la finesse, que la précession annuelle des équinoxes doit être de 50 secondes, telle qu’elle est en effet. Mais si on ne saurait désirer une plus grande exactitude dans l’accord de ses calculs avec les observations, il me semble qu’il n’en est pas de même des principes sur lesquels son analyse est appuyée. Pour développer les raisons qui m’obligent à penser ainsi, il est nécessaire de donner une idée de l’ingénieuse théorie de Newton, autant que les bornes et la nature de cette introduction pourront me le permettre.

  1. Le mot de précession des équinoxes peut venir ou de ce que le mouvement des points oquinoxiaux se fait, pour parler le langage des astronomes, vers les signes qui précèdent, c’est-à-dire contre l’ordre naturel des signes ; ou de ce que, par la rétrogradation de ces points, le moment où l’équinoxe arrive chaque année, précède celui où la terre revient au point de son orbite où l’équinoxe était arrivé l’année d’auparavant.