Page:D’Alembert - Œuvres complètes, éd. Belin, I.djvu/462

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

INTRODUCTION
ET ANALYSE
DES TROIS PARTIES COMPOSANT LES RÉFLEXIONS
SUR LA CAUSE GÉNÉRALE DES VENTS,


Ouvrage qui a remporté le prix proposé par l’Académie de Berlin, en 1746.




Quelque inconstant que paraisse le cours des vents, il est cependant assujéti à certaines lois. Les navigateurs observent depuis long-temps que l’air a un mouvement réglé en pleine mer sous la zone torride ; et s’ils remarquent quelques variations dans ce mouvement, c’est principalement proche des côtés et vers les endroits où l’Océan est resserré par les terres. On ne peut dont s’empêcher de reconnaître que, parmi les différentes causes des vents, il y en a au moins une dont l’action suit un ordre uniforme et invariable, et dont les effets, lors même qu’ils semblent le plus irréguliers, ne sont peut-être que modifiés, et pour ainsi dire, déguisés par des causes accidentelles. Ainsi le premier objet qu’un philosophe doive avoir en vue, lorsqu’il se propose d’approfondir la théorie des vents, c’est d’examiner quelle peut être cette cause générale, et de déterminer, s’il est possible, par le calcul, sa quantité, son action et ses effets.

Tous les physiciens conviennent aujourd’hui que le flux et reflux journalier des eaux de la mer ne peut être attribué qu’à l’action du soleil et de la lune. Quel que soit leur principe de cette action, il est incontestable que pour se transmettre jusqu’à l’Océan, elle doit traverser auparavant la masse d’air dont il est environné, et que par conséquent elle doit mouvoir les parties qui composent cette masse. Nous pouvons donc regarder l’action du soleil et de la lune, sinon comme l’unique cause des vents, au moins comme une des causes générales que nous cherchons ; et une telle supposition est d’autant plus vraisemblable, que les endroits où l’Océan est libre, sont, comme nous venons de le dire, les plus sujets aux vents réguliers.

Il résulte de cette première réflexion, que la force de la lune pour agiter l’air que nous respirons, et pour en changer la