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SUR LE MOUVEMENT

les forces motrices qui le poussent, etc. Encore quand chacune de ces choses serait parfaitement connue, la grande multitude d’élémens qui entreraient dans une pareille théorie nous conduirait vraisemblablement à des calculs impraticables. C’est en effet ici un des cas les plus composés d’un problème dont le cas le plus simple est fort difficile à résoudre. Lorsque les effets de la nature sont trop compliqués et trop peu connus pour pouvoir être soumis à nos calculs, l’expérience, comme nous l’avons déjà dit, est le seul guide qui nous reste : nous ne pouvons nous appuyer que sur des inductions déduites d’un grand nombre de faits. Voilà le plan que nous devons suivre dans l’examen d’une machine aussi composée que le corps humain. Il n’appartient qu’à des physiciens oisifs de s’imaginer qu’à force d’algèbre et d’hypothèses ils viendront à bout d’en dévoiler les ressorts, et de réduire en calcul l’art de guérir les hommes.

Après avoir déterminé par les méthodes les plus exactes qu’il nous a été possible les lois du mouvement des fluides, il ne nous reste plus qu’à examiner leur action sur les corps solides qui y sont plongés et qui s’y meuvent. Rien n’est plus difficile que de donner là-dessus des règles précises et exactes : car non-seulement on ignore la figure des parties du fluide et leur disposition par rapport au corps qui les frappe, on ignore aussi jusqu’à quelle distance le corps agit sur le fluide, et quelle route les particules prennent lorsqu’elles ont été mises en mouvement par ce corps. Tout ce que l’expérience nous apprend, c’est que les particules du fluide, après avoir été poussées, se replient ensuite derrière le corps pour venir occuper l’espace qu’il laisse vide par derrière.

Voici donc le plan que j’ai cru devoir suivre dans une recherche de la nature de celle-ci. J’ai déterminé d’abord le mouvement qu’un corps solide doit communiquer à une infinité de petites boules dont on suppose qu’il est couvert ; j’ai fait voir ensuite que le mouvement perdu par ce corps dans un instant donné était le même, soit qu’il choquât à la fois un certain nombre de couches de ces petites boules, soit qu’il ne les choquât que successivement ; que de plus, la résistance serait la même quand les petits corpuscules seraient de toute autre figure que la sphérique, et disposés de quelque manière que ce fût, pourvu que la masse totale de ces petits corps contenus dans un espace donné, fût supposée la même que quand ils étaient de petites boules. Par ce moyen je suis arrivé à des formules générales sur leur résistance, dans lesquelles il n’entre que le rapport des densités du fluide et du corps qui s’y meut. J’ai