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SUR LE SYSTÈME

titiide dans des lieux très-éloignés, et y avoir trouve trop de différence pour l’imputer aux observateurs. Je dis dans des lieux très-éloignés ; car quand le méridien d’Italie et celui de France seraient réellement différens, comme ces méridiens ne sont pas fort distans l’un de l’autre, on pourrait toujours rejeter sur les erreurs de l’observation la différence qu’on trouverait entre les degrés correspondans de France et d’Italie à la même latitude. Il faudrait de plus observer le pendule à la même latitude, sous des méridiens très-différens et très-éloignés ; on verrait par là si les longueurs observées différeraient assez pour en pouvoir conclure l’inégalité de pesanteur à la même latitude, sous des méridiens différens, et par conséquent, ce qui en serait une suite presque nécessaire, la dissimilitude de ces méridiens.

Au reste, en attendant que l’observation directe du pendule, ou la mesure immédiate des degrés nous donne à cet égard les connaissances qui nous manquent, l’analogie, quelquefois si utile en physique, pourrait nous éclairer jusqu’à un certain point sur l’objet dont il s’agit, en y employant les observations de la figure de Jupiter. L’aplatissement de cette planète, observée dès 1666 par Picard, avait déjà fait soupçonner celui de la terre, long-temps avant que l’on s’en fût invinciblement assuré par la comparaison des degrés du nord et de France. Des observations réitérées de cette même planète, nous apprendraient aisément si son équateur est circulaire ; pour cela il suffirait d’observer l’aplatissement de Jupiter dans ditférens temps. Comme son axe est à peu près perpendiculaire à son orbite, et par conséquent à l’écliptique qui ne forme qu’un angle d’^environ un degré avec l’orbite de Jupiter, il est évident que si l’équateur de Jupiter est un cercle, le méridien de cette planète perpendiculaire au rayon visuel tiré de la terre, doit toujours être le même, et qu’ainsi Jupiter doit paraître toujours également aplati, dans quelque temps qu’on l’observe. Ce serait le contraire si les méridiens de Jupiter étaient dissemblables. Je sais que cette observation ne sera pas démonstrative par rapport à la similitude ou dissimilitude des méridiens de la terre ; mais enfin si les méridiens de Jupiter se trouvaient semblables, comme j’ai lieu de le soupçonner par les questions que j’ai faites làdessus à un très-habile astronome, on serait, ce me semble, assez bien fondé à croire, au défaut de preuves plus rigoureuses, que la terre aurait aussi ses méridiens semblables. Car les observations nous prouvent que la surface de Jupiter est sujette à des altérations sans comparaison plus considérables et pi us fréquentes que celles de la terre ; or si ces altérations n’influaient en