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SUR LE SYSTÈME

vait plus la figure elliptique, la seule que la théorie lui eut fait

trouver jusqu’alors.

À peine cette première difficulté fut-elle vaincue, ou plutôt palliée, qu’il s’en présenta de nouvelles. Le degré mesuré au cap de Bonne-Espérance par 33° 18′ de latitude australe, se trouva de 57037 toises, c’est-à-dire presque égal au nouveau degré de France, et par conséquent beaucoup plus grand qu’il n’aurait du être par rapport à ce degré. Cette mesure étant supposée juste, il s’ensuivait que les deux hémisphères de la terre n’étaient pas semblables, mais du moins on pouvait encore se flatter que tous les méridiens étaient les mêmes, quoique composés de parties inégales des deux côtés de l’équateur : cette hypothèse n’avait point encore été ébranlée : elle vient de l’être par la longueur du degré mesuré en Italie, sous un autre méridien que celui de France. Cette longueur diffère de 70 toises de ce qu’elle aurait du être, si le méridien d’Italie était semblable au nôtre. De plus, ce degré ne s’accorde nullement avec l’hypothèse elliptique, même en supposant les méridiens semblables. Il ne manque plus rien, comme l’on voit, pour rendre la question de la figure de la terre aussi obscure que le pyrrlionisme peut le désirer.

Les doutes qu’on pouvait se former sur la figure elliptique des méridiens m’avaient déjà frappé dans le temps que je publiai les deux premières parties de ces Recherches ; et ce fut en conséquence que j’indiquai à la fin de la seconde de ces deux parties, une méthode générale pour trouver la figure de la terre par la mesure des degrés, sans s’appuyer sur aucune théorie ; j’y joignis une méthode pour déterminer par la théorie cette même figure, en ne regardant plus le méridien comme une ellipse, méthode que les géomètres semblaient désirer depuis long-temps. J’étais alors très-porté à penser que les méridiens de la terre étaient semblables, et je crois encore que cette hypothèse ne doit pas être proscrite sans des raisons démonstratives. Cependant, pour ne rien me dissimuler à moi-même, il m’a paru qu’il était à propos d’examiner en toute rigueur les suppositions sur lesquelles la mesure du degré est fondée ; ces suppositions sont en premier lieu que le plan du méridien, celui dans lequel le soleil se trouve à midi, passe par l’axe même de la terre, et par conséquent par son centre ; en second lieu, que la ligne du zénith est perpendiculaire à la surface de la terre, ou, ce qui revient au même, à l’horizon du lieu oii l’on observe, c’est-à-dire au plan qui toucherait la surface de la terre en ce lieu. Or je trouve, par des raisons dont je renvoie le détail à mon ouvrage, qu’il est presque impossible de s’assurer démonstrativement par l’obser-