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DU MONDE.

moins souvent ignorés avant que l’observation les découvre. Quoi qu’il en soit, on conclut de la diminution observée de la pesanteur à l’équateur, que la terre devait être aplatie, c’est-à-dire plus élevée à l’équateur qu’aux pôles ; mais cette conséquence supposait que la terre eût été primitivement fluide, et qu’en se durcissant elle eut conservé sa première figure. Or cette hypothèse n’étant pas démontrée, la conséquence qu’on en tirait avait besoin, pour être mise hors d’atteinte, d’être vérifiée par l’observation : on n’en trouva point de plus directe que celle de la mesure des degrés, qui devaient aller en diminuant du pôle vers l’équateur si la terre était un sphéroïde aplati. La mesure des degrés dans l’étendue de la France contredit d’abord cette conclusion, elle donnait les degrés plus petits à mesure qu’on approchait du pôle ; mais comme la différence entre les degrés voisins était assez peu considérable pour pouvoir être attribuée aux observations, on résolut, pour éviter cette source d’erreur, de mesurer les degrés les plus éloignés qu’il serait possible, l’un sous l’équateur, l’autre en Laponie ; ce dernier degré s’est trouvé en effet plus grand que le degré moyen de France, et celui-ci plus grand que le degré sous l’équateur ; ainsi la terre est redevenue aplatie comme la théorie l’avait d’abord fait juger. Il fallait de plus, par cette théorie, que le méridien fût une ellipse dont les axes différassent de 1/230 ; dans cette supposition, les trois degrés du sud, de France et du nord, devaient avoir une certaine proportion, dont en effet ils ne s’éloignaient pas beaucoup. De plus, la différence des axes supposée de 1/230 demandait que les longueurs du jjendule à ces trois latitudes eussent un rapport, et ce rapport s’éloignait assez de celui que la théorie donnait. Ainsi d’un côté l’observation des degrés était assez favorable à la théorie, de l’autre celle du pendule y paraissait assez contraire. On prétendit d’ailleurs que Picard s’était trompé non-seulement sur l’amplitude de son arc, mais encore sur la mesure de la base qui lui avait donné le degré de France, et en conséquence on crut devoir raccourcir de 109 toises le degré qu’on venait de fixer à 57188, on le mit à 57074 ; nouvel échec pour la théorie, qui alors semblait démentie par îa mesure même des degrés. On avait mesuré à peu près vers le même temps un degré de longitude à 43° 32′ de latitude ; ce degré, qui s’accordait assez bien avec la figure de la terre résultante des trois premiers degrés, ne s’accordait plus avec le nouveau degré de France, non plus que les deux degrés du Pérou et de Laponie. On chercha cependant à faire cadrer de son mieux ces quatre degrés les uns avec les autres, en donnant au méridien une forme qui s’y ajustât, mais ce méridien n’a-