Page:D’Alembert - Œuvres complètes, éd. Belin, I.djvu/361

Cette page n’a pas encore été corrigée
321
DE PHILOSOPHIE.

une hypothèse par son accord admirable avec les observations astronomiques.

Parmi les différentes suppositions que nous pouvons imaginer pour expliquer un effet, les seules dignes de notre examen sont celles qui par leur nature nous fournissent des moyens infaillibles de nous assurer si elles sont vraies. Le système de la gravitation est de ce nombre, et mériterait par cela seul l’atlenlioii des philosophes. On n’a point à craindre ici cet abus du calcul et de la géométrie, dans lequel les physiciens ne sont que trop souvent tombés pour défendre ou pour combattre des hypothèses. Les planètes étant supposées se mouvoir, ou dans le vide, ou au moins dans un espace non résistant, et les forces par lesquelles elles agissent les unes sur les autres étant connues., c’est un problème purement mathématique, que de déterminer les phénomènes qui en doivent naître ; on a donc le rare avantage de pouvoir juger irrévocablement du système newtonien, et cet avantage ne saurait être saisi avec trop d’empressement ; il serait à souhaiter que toutes les questions de la physique pussent être aussi incontestablement décidées. Ainsi on ne pourra regarder comme vrai le système de la gravitation, qu’après s’être assuré par des calculs précis qu’il répond exactement aux phénomènes ; autrement l’hypothèse newtonienne ne mériterait aucune préférence sur celle des tourbillons, par laquelle on explique à la vérité bien des circonstances du mouvement des planètes, mais d’une manière si incomplète, et pour ainsi dire si lâche, que si les phénomènes étaient tout autres qu’ils ne sont, on les expliquerait toujours de même, très-souvent aussi bien, et quelquefois mieux. Le système de la gravitation ne nous permet aucune illusion de cette espèce ; un seul article oii l’observation démentirait le calcul ferait écrouler l’édifice, et reléguerait la théorie newtonienne dans la classe de tant d’autres que l’imagination a enfantées, et que l’analyse a détruites.

L’accord qu’on a remarqué entre les phénomènes célestes et les calculs fondés sur le système de la gravitation, accord qui se vérifie tous les jours de plus en plus, semble avoir pleinement décidé les philosophes en faveur de ce système. Les preuves en sont répandues dans une infinité d’ouvrages, et le précis de ces preuves doit se trouver dans des éléraens de philosophie. C’est par un pareil examen, par une analyse rigoureuse des faits, qu’il faut juger la philosophie newtonienne, et non par des raisonnemens métaphysiques, aussi peu propres à détruire une hypothèse qu’à l’établir. Ne pouvant entrer ici dans ce détail, nous nous bornerons à exposer ce qu’il nous semble qu’on doit penser en général du système de la gravitation, des applications