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ÉLÉMENS

mière (en les supposant toutes deux finies) est d’autant plus grand que cette première est plus grande ; et que ce rapport peut être supposé plus grand qu’aucun nombre fini qu’on voudra assigner.

Si on dit que la seconde ligne est infinie du troisième ordre, cela signifie, en s’exprimant nettement, que le produit de la seconde ligne, par une ligne finie quelconque, est d’autant plus grand par rapport au carré construit sur la première, que cette première est plus grande ; et que le rapport peut être plus grand qu’aucun rapport fini.

De mêine, quand on dit qu’une courbe est un polygone d’une infinité de côtés, on veut dire que cette courbe est la limite des polygones qu’on peut lui inscrire et lui circonscrire, c’est-à-dire que plus ces polygones auront de côtés, plus ils approcheront d’être égaux à la courbe, dont on peut supposer qu’ils diffèrent aussi peu qu’on voudra, en augmentant à volonté le nombre de leurs côtés.

C’est ainsi qu’on peut attacher des notions nettes, simples et précises, aux expressions dans lesquelles entrent le terme ou l’idée d’infini. Ces expressions, si communes dans la haute géométrie, sont dans la classe de plusieurs autres que nous offre cette science, ainsi que nous l’avons déjà observé plus haut[1] ; expressions, qui, comme nous l’avons dit, dans le sens métaphjsique quelles présentent, paraissent peu exactes ; mais qui ne doivent être regardées que comme des manières abrégées de s’exprimer, que les mathématiciens ont inventées pour énoncer une vérité, dont le développement et l’énoncé exact auraient demandé beaucoup plus de mots.

Ce que j’ai dit sur la quantité infinie, je le dis de même de la quantité infiniment petite. Le calcul de l’infini ne suppose point l’existence de ces sortes de quantité. Il est nécessaire de développer cette idée.

Je veux, par exemple, trouver la tangente d’une courbe CAB au point A. Je prends d’abord deux points à volonté A, B, sur cette ligne courbe, et par ces deux points, je tire une ligne droite AB, indéfiniment prolongée vers Z et vers X, laquelle coupe la courbe, comme cela est évident ; j’appelle cette ligne une sécante ; j’imagine ensuite une ligne fixe CE, placée à volonté dans le plan sur lequel est tracée la courbe ; et par les deux points A, B, que

  1. Voyez le § XII, sur les Élémens de Géométrie, p. 277.