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DE PHILOSOPHIE.

surables parmi les nombres : la première, c’est que ces rapports ont plusieurs propriétés qui leur sont communes avec les nombres, et peuvent être soumis à plusieurs égards à un calcul semblable à celui des nombres, comme nous le verrons plus en détail dans les deux paragraphes suivans ; la seconde, c’est que si on veut donner au mot nombre une idée plus étendue que celle qu’on lui donne ordinairement, et qui ne renferme proprement que les nombres entiers et les fractions, alors les rapports incommensurables peuvent y être compris, puisque ces rapports, quoiqu’ils ne puissent pas être désignés rigoureusement par l’arithmétique, peuvent être, sinon exprimés, au moins représentés par la géométrie ; par exemple, le rapport de la racine carrée de 2 à l’unité, lequel ne peut être exprimé arithmétiquement, peut être représenté géométriquement, par le rapport de la diagonale du carré à son côté. Il en est de même d’une infinité d’autres rapports incommensurables, que la géométrie représente aisément par les rapports de certaines lignes ; par exemple, la racine carrée de 3 peut être représentée par le rapport du double de la hauteur d’un triangle équilatéral au côté du même triangle ; celle de 5 par le rapport de la diagonale d’un parallélogramme rectangle au petit côté de ce même parallélogramme, en supposant la base double de la hauteur ; et ainsi de mille autres exemples de cette espèce qu’on pourrait multiplier à l’infini. Cette remarque sur la possibilité de représenter les rapports incommensurables par la géométrie, nous sera utile dans la suite pour faire connaître quel est l’avantage de l’application de l’analyse à cette science. C’est ce qu’on verra plus bas dans un article particulier ; mais il est nécessaire de donner auparavant quelque idée du calcul algébrique. (Voyez l’article Algèbre, p. 260, et l’Éclaircissement, § XI, p. 263. ;

§ XIII. Eclaircissement sur l’application de l’algèbre à la géométrie, p. 274

Pour se faire une idée de cette application, et en comprendre les avantages, il faut se rappeler les principes suivans.

La géométrie est, comme nous l’avons dit ailleurs, la science des propriétés de l’étendue, considérée simplement en tant qu’étendue et figurée.

Ces propriétés consistent en grande partie dans le rapport qu’ont entre elles les différentes parties de l’étendue figurée.

Par conséquent, un des grands objets de la géométrie est de connaître et de calculer le rapport des lignes les unes avec les autres, celui des surfaces entre elles, et celui dessolides entre eux.