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DE PHILOSOPHIE.

rectangle, égal à la somme des carrés des deux côtés ; proposition dont la découverte coûta, dit l’histoire ou la fable, une hécatombe à Pythagore.

On peut aussi déduire cette vérité, comme a fait Euclide, de celle de l’égalité des triangles de même base et de même hauteur, ou, comme ont fait d’autres géomètres, de celle des côtés proportionnels dans les triangles semblables. Il ne serait peut-être pas inutile, dans des élémens philosophiques de géométrie, de marquer ou d’indiquer au moins ces différentes voies qui conduisent à la même vérité. On pourrait faire la même chose pour d’autres propositions fondamentales^ par exemple, pour celle de l’égalité des angles du triangle à deux angles droits ; laquelle peut se déduire également ou des propositions sur les parallèles, ou de celles sur la mesure des angles. L’esprit s’étend et se fortifie, en voyant par ces différentes combinaisons qui conduisent au même but, de quelle manière les vérités se rapprochent, et rentrent les unes dans les autres.

Comme nous ne nous sommes pas proposé de donner ici des élémens de géométrie, ni même un plan général pour ces élémens, nous croyons en avoir dit assez pour faire entendre ce que nous appelons dans les sciences principes du premier ordre et principes du second, et la manière de reconnaître les uns et les autres. Ce que nous avons dit de ces différentes sortes de principes, et ce que nous venons d’ajouter sur la manière dont certaines vérités se rapprochent, en conduisant par différentes routes à une même vérité fondamentale ; tout cela pourrait se représenter aisément dans une espèce d’arbre figuré ou généalogique, oii la dépendance mutuelle des vérités fondamentales et la nature de cette dépendance serait marquée par des lignes de communication différentes, et par ce moyen s’apercevrait sur-le-champ. Cet arbre serait plus utile que tant d’arbres de nomenclature dont la plupart des sciences sont accablées, et qui forment presque toute la substance de quelques unes ; ces arbres ne marquent pour l’ordinaire qu’un rapport stérile entre des noms ; celui que nous proposons montrerait le rapport entre des vérités importantes.

C’est à peu près suivant ce plan qu’un philosophe pourrait composer ou esquisser au moins des élémens de géométrie. Il ne serait pas nécessaire qu’il y entrât dans le détail de toutes les propositions ; il suffirait qu’il démontrât les propositions principales, et qu’il indiquât celles qui en dérivent, à peu près comme les anciens plaçaient dans leurs grandes routes des colonnes milliaires pour guider les voyageurs, ou comme un artiste trace à ses élèves le contour des figures qu’il leur laisse à