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DE PHILOSOPHIE.

peraent et l’énonciation des principes fondamentaux de chaque science, de ceux qui forment, comme nous l’avons dit, la tête de chaque portion de la chaîne. Nous les appelons principes y parce que c’est là que nos connaissances commencent. Mais bien loiu de mériter ce nom par eux-mêmes, ils ne sont peut-être que des conséquences fort éloignées d’autres principes plus généraux que leur sublimité dérobe à nos regards. N’imitons pas les premiers habitans des bords de la mer, qui ne voyant point de ferme au-delà du rivage, croyaient qu’il n’y en avait pas. (Voyez Éclaircissement, § III, pag. 147.)

À l’égard des vérités qui se trouvent aux points de réunion des différentes branches de la chaîne, elles ne sont des principes, ni en elles-mêmes, ni par rapport à nous, puisqu’elles sont le résultat de plusieurs autres vérités. Mais elles doivent entrer dans des élémens par le grand nombre de vérités qu’elles produisent ; et elles peuvent à cet égard être traitées comme des principes du second ordre. On reconnaîtra donc ces principes au double caractère, d’avoir au-dessous d’eux un grand nombre de vérités de détail, et d’être eux-mêmes dépendans de deux ou de plusieurs vérités primitives. Si cette dépendance ne s’aperçoit pas du premier coup d’œil, on remplira l’intervalle par quelques vérités destinées à former la liaison, et qui doivent, non pas se toucher immédiatement, mais être disposées entre elles à cette juste distance qui permet à l’esprit le passage facile de l’un à l’autre. Ces vérités, qui doivent mener des premiers principes à ceux du second ordre, auront pour l’ordinaire elles-mêmes quelques autres vérités au-dessous d’elles dans des branches collatérales ; et par là elles seront faciles à reconnaître pour celles qu’on doit employer par préférence dans des élémens de philosophie. (Voyez Éclaircissement, § W, pag. 149.)

§ I. Éclaircissement sur ce qui est dit du défaut d’enchaînement entre les vérités, pag. 130.

Deux inconvéniens arrêtent ou retardent le progrès des connaissances humaines ; le peu de vérités auxquelles nous pouvons atteindre, et le défaut d’enchaînement entre les vérités coanues. Ces deux inconvéniens se font sentir plus ou moins, selon la nature des objets sur lesquels roulent ces vérités. Dans la métaphysique, par exemple, le nombre des vérités que nous connaissons est frès-petit ; mais ce peu que nous connaissons est assez bien lié, au moins dans cette parlie de la métaphysique, la pins