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DISCOURS PRÉLIMINAIRE

qui ont mieux aimé se charger de la revoir, de la corriger, de l’augmenter, que de s’engager, sans avoir, pour ainsi dire, aucuns matériaux préparatoires. Il est vrai qu’une grande partie de ces matériaux leur a été inutile, mais du moins elle a servi à leur faire entreprendre plus volontiers le travail qu’on espérait d’eux ; travail auquel plusieurs se seraient peut-être refusé, s’ils avaient prévu ce qu’il devait leur coûter de soins. D’un autre côté, quelques uns de ces savans, en possession de leur partie long-temps avant que nous fussions éditeurs, l’avaient déjà fort avancée en suivanut l’ancien projet de l’ordre alphabétique. Il nous eût par conséquent été impossible de changer ce projet, quand même nous aurions été moins disposés à l’approuver. Nous savions enfin, ou du moins nous avons lieu de croire, qu’on n’avait fait à l’auteur anglais, notre modèle, aucunes difficultés sur l’ordre alphabétique auquel il s’était assujéti. Tout se réunissait donc pour nous obliger à rendre cet ouvrage conforme à un plan que nous aurions suivi par choix, si nous en eussions été les maîtres.

La seule opération dans notre travail qui suppose quelque intelligence, consiste à remplir les vides qui séparent deux sciences ou deux arts, et à renouer la chaîne dans les occasions oii nos collègues se sont reposés les uns sur les autres de certains articles, qui, paraissant appartenir également à plusieurs d’entre eux, n’ont été faits par aucun. Mais afin que la personne chargée d’une partie ne soit point comptable des fautes qui pourraient se glisser dans des inorceaux sur-ajoutés, nous aurons l’attention de distinguer ces morceaux par une étoile. Nous tiendrons exactement la parole que nous avons donnée ; le travail d’autrui sera sacré pour nous, et nous ne manquerons pas de consulter l’auteur, s’il arrive dans le cours de l’édition que son ouvrage nous paraisse demander quelque changement considérable.

Les différentes mains que nous avons employées ont apposé à chaque article comme le sceau de leur style particulier, ainsi que celui du style propre à la matière et à l’objet d’une partie. Un procédé de chimie ne sera point du même ton que la description des bains et des théâtres anciens ; ni la manœuvre d’un serrurier, exposée comme les recherches d’un théologien sur un point de dogme ou de discipline. Chaque chose a son colons, et ce serait confondre les genres que de les réduire à une certaine uniformité. La pureté du style, la clarté et la précision, sont les seules qualités qui puissent être communes à tous les articles, et nous espérons qu’on les y remarquera. S’en permettre davantage, ce serait s’exposer à la monotonie et au dégoût qui sont in-