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DÉDICACE


Asile à qui tenta la stérile aventure ;
Chambre aux divans drapés de magiques tentures
Sachet mystérieux parfumant des coussins
Qui gardent la tiédeur et la rondeur des seins ;
Encens dont la fumée hésite ; cassolettes
D’où montent, nous liant d’étroites bandelettes,
Les parfums abolis des reines de Saba ;
Appels d’en haut parmi des rumeurs de sabbat
Et, parfois, s’éveillant dans l’ombre fraternelle,
La palpitation et le battement d’ailes
De l’âme qui se heurte aux murs de sa prison ;
Souvenir des pays aux grasses floraisons
Où la femme a des yeux et des baisers étranges :
Ô vous, le plus amer et le plus doux des Anges,
Voici l’heure où le jour dans la nuit sourde choit,
Voici l’heure où la nuit rouvre l’escalier froid
Qui descend à la crypte où nul flambeau n’éclaire :
Priez pour nous, veillez sur nous, ô Baudelaire.