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sa chute. » Dès lors « rien n’est intéressant que la religion… » Il faut « prier, prier sans cesse, la prière est un réservoir de forces… L’homme qui fait sa prière du soir est un capitaine qui pose des sentinelles : il peut dormir… »

Il y a là, comme on le voit, une façon très nette de poser le problème religieux. À peine le poète a-t-il la foi que, déjà, il se met en prière. N’est-ce pas que, tout comme Pascal, il songe à cette « dynamique » de Dieu, qui est peut-être l’une des bases de la religion catholique. D’après l’enseignement de l’Église, nul ne s’élève jusqu’à Dieu sans un effort constant et d’abord gratuit, et nul ne conserve sa liaison avec lui s’il ne persévère dans cet effort. Baudelaire ici est tout près des mystiques. « Il existe une dynamique morale de Jésus… Les sacrements sont les moyens de cette dynamique. »

Mais sur un autre point il va s’éloigner d’eux. C’est quand il dit (et non seulement il le dit, mais il le répète comme un secret précieux) : « Avant tout être un grand homme pour soi-même, et un saint… Être un grand homme et un saint pour soi-même : voilà l’unique chose importante. » Et ce : pour soi-même constitue, si l’on y prend garde, un démenti à la conception mystique de la sainteté tel qu’il l’exposait un instant plus tôt : il y manque l’humilité.

Si donc on s’en tient là, cette religion de