Page:Démosthène - Œuvres complètes, Auger, 1820, tome 5.djvu/498

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.
488
HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

de la Grèce, dans la joie et les festins, à la table des meurtriers de leurs compatriotes. Ils ne voulaient pas qu’on déplorât le sort de nos héros avec des larmes feintes, ni qu’on jouât la douleur, mais qu’on la ressentît réellement. Cette douleur sincère, ils la trouvaient dans leur cœur, dans le mien, non dans le vôtre ; c’est pour cela qu’ils vous ont rejeté, et qu’ils m’ont choisi. Les pères et les frères de nos guerriers malheureux, chargés du soin des obsèques, me rendirent la même justice. Il était d’usage que le banquet funèbre se fît chez le plus proche parent des morts ; ils le firent chez moi, et j’ose dire qu’ils me devaient cette déférence ; car si, par le sang, ils étaient plus unis à chacun d’eux en particulier, je l’étais, plus que personne, à tous en général par le sentiment. Oui, sans doute, le plus intéressé à leur salut et à leurs succès devait, dans l’affliction commune, sentir, plus vivement qu’aucun autre, une perte si digne de nos regrets et de nos larmes.

Greffier, lisez-nous l’inscription même dont le peuple voulut honorer leur mémoire ; Eschine s’y reconnaîtra pour un insigne calomniateur, pour un personnage odieux.

Inscription.

Ceux qu’enclôt cette tombe, armés pour la patrie,
À l’intérêt commun ont immolé leur vie.
Contre un injuste effort leur vaillante fierté
Combattit pour les Grecs et pour la liberté,
Pour les sauver du joug d’un honteux esclavage :