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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

espèce de compte, vous serez à la fois mes témoins et mes juges.

C’est par ma politique, objet de ses accusations, que les Thébains se joignirent à nous pour arrêter Philippe, au lieu de tomber avec ce prince sur notre pays, comme on le craignait ; c’est par moi que la guerre s’arrêta à sept cents stades de la ville, sur les terres des Béotiens, au lieu de venir embraser l’Attique ; c’est par moi que l’Attique, du côté de la mer, fut en paix pendant toute la guerre, au lieu d’être infestée et pillée par les pirates de l’Eubée ; c’est par moi que Philippe eut deux ennemis sur les bras, les Byzantins et nous, au lieu d’envahir l’Hellespont, en prenant Byzance. Eh bien ! Eschine, la révision de ces faits vous paraît-elle semblable à un calcul d’arithmétique ? faut-il les rayer de nos annales, et non plutôt chercher à en perpétuer la mémoire ? Je n’ajoute pas que les autres peuples ont éprouvé la cruauté de Philippe, toujours terrible, quand une fois il a été le maître ; que vous. Athéniens, vous avez justement recueilli les fruits de cette douceur qu’il affectait à votre égard, et dont il couvrait ses desseins sur le reste de la Grèce [81]. Je ne dis rien de cela ; mais je ne crains point de dire qu’un homme qui voudrait juger avec équité la conduite d’un ministre, et non la censurer avec malignité, ne me ferait jamais les reproches que vous me faisiez tout-à-l’heure, ne s’amuserait jamais à for-