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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

combattre pour la prééminence, s’exposer pour l’honneur et pour la gloire. Et même. Athéniens, ces principes vous paraissent si beaux, si conformes à votre caractère, que vous vantez ceux de vos ancêtres qui les ont suivis, les comblant d’éloges qu’ils méritent, sans doute. Qui n’admirerait, en effet, le courage et la résolution de ces grands hommes qui, abandonnant leur pays et leur ville, sont montés sur leurs vaisseaux pour éviter de souscrire aux volontés d’un maître [75] ? Thémistocle qui leur donnait ce conseil, fut élu général ; Cyrsile, qui leur conseillait d’obéir, fut lapidé par vous ; et non-seulement lui, mais sa femme elle-même fut lapidée par les vôtres. Car, les Athéniens d’autrefois ne cherchaient pas un orateur, un général, qui leur procurât une heureuse servitude : ces fiers républicains auraient mieux aimé ne pas vivre, que de vivre esclaves. Chacun d’eux ne se croyait pas né seulement pour ses parens et pour ses proches, mais pour sa patrie, avant tout. Et pourquoi cela ? c’est qu’un citoyen qui se croit né seulement pour ses parens et pour ses proches, attend de la nature la mort qu’elle lui prépare ; celui, au contraire, qui se croit né sur-tout pour sa patrie, ira au-devant du trépas pour ne la point voir dans l’esclavage ; et il regarderait comme plus terribles que la mort, la honte et les insultes qu’il lui faudrait essuyer dans une ville asservie.

Si donc j’osais dire que c’est moi, Démosthène,