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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

la vigilance possibles, avec une activité même qui fût au-dessus de mes forces ; que je n’aie pas porté la république à des entreprises honorables, dignes d’elle, et nécessaires ; montrez-le moi, et ensuite venez m’accuser. S’il est survenu, Athéniens, une tempête violente, un coup de foudre supérieur à tous vos efforts et à ceux de tous les Grecs, que faire, je vous prie ? Faut-il m’imputer ce contretems ? Faudrait-il imputer le naufrage à un commandant de navire, qui, n’ayant rien négligé pour la sûreté de son vaisseau, ayant eu soin de le munir de toutes les choses nécessaires, le verrait assailli, fatigué, et même brisé par la tempête ? Je ne gouvernais pas le vaisseau, dirait-il ; et moi, je ne commandais pas l’armée, je n’étais pas le maître du sort : le sort est le maître de tout.

Raisonnez donc, Eschine, et ouvrez les yeux. Si le succès nous a été si contraire, quoique nous fussions unis aux Thébains, à quoi fallait-il nous attendre, s’ils n’eussent pas été nos amis. s’ils l’eussent été de Philippe, qui alors épuisait sa politique pour s’attacher ce peuple ! Si la défaite nous a jetés dans un tel péril et dans une telle consternation, quoique le combat [70] eût été donné à trois journées de l’Attique, que ne devions-nous pas craindre, si ce malheur fût arrivé sur notre territoire ? Pourrions-nous encore subsister, conférer, respirer ? Un jour eût suffi pour sauver l’état ; mais deux, mais trois, nous ont fourni bien des