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HARANGUE DE DÉMOSTHÈNE SUR LA COURONNE.

et par de vaines promesses ; c’est celui-là même qui déplore aujourd’hui les maux des Thébains, qui en fait un récit lamentable, lui qui est la cause de leurs maux, de ceux des Phocéens, et généralement de tous les malheurs de la Grèce. Oui, sans doute, Eschine, ces malheurs vous touchent, l’infortune des Thébains vous afflige, vous qui avez des possessions dans la Béotie[1], qui labourez les champs dont ils sont dépouillés ; et je m’en réjouis, moi, Démosthène, dont la tête fut demandée aussitôt après par le prince auteur de leur désastre. Mais, je suis tombé sur des discours qu’il est peut-être à propos de renvoyer à un autre tems ; je reviens donc à prouver que la corruption et la perfidie de mes adversaires sont la cause des calamités présentes.

Lorsque Philippe vous eut trompés, grâce à ces députés perfides, qui, en Macédoine, s’étaient rendus à lui, et qui ne vous annonçaient ici que des mensonges ; lorsque les Phocéens eurent été les victimes du même artifice, et que leurs villes eurent été ruinées, qu’arriva-t-il ? Les méprisables Thessaliens et les stupides Thébains voyaient, dans l’ennemi commun, leur ami, leur bienfaiteur, leur libérateur ; il était tout pour eux ; ils ne voulaient rien entendre, quand on leur parlait contre Philippe. Vous, Athéniens, quoique mécontens et remplis de défiance, vous observiez néanmoins la paix : et que pouviez-vous faire étant seuls ? Les

  1. La Béotie était la contrée, et comme la province dont Thèbes était la capitale. Eschine avait eu ou avait acquis des terres dans cette contrée. — Dont la tête… Alexandre, après avoir ruiné Thèbes, demanda aux Athéniens effrayés, et qui craignaient pour eux le même sort, qu’ils lui livrassent quelques-uns de leurs orateurs, au nombre desquels était Démosthène : mais il se désista de sa demande.