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SOMMAIRE DES DEUX HARANGUES.

Mon amour pour mes modèles ne m’aveugle pas néanmoins sur leurs défauts. Je sais que les Grecs ont toujours passé, et avec quelque justice, pour babillards. £schine cl Démosthène sont quelquefois (Irecs en cela : ils babillent quelquefois un peu trop ; ils tombent dans des longueurs, surtout £schine. Car, excepté quelques morceaux que Démosthène aurait pu absolument retrancher, il n’y a aucun vide, rien d’inutile dans sa harangue. Bien plus vif, bien plus pressant que son rival, il raisonne toujours diaprés des principes lumineux, dont il tire les conséquences les plus justes. Dès le commencement de son discours, il établit un principe qui renverse d’un seul coup l’accusation entière, en jetant sur l’accusateur le soupçon le plus violent de malignité et de calomnie. Tous les faits qu’il raconte, sont autant de preuves solides, qui lui fournissent d’autres preuves par induction. Avec ce ton tranchant et décidé, ce Ion de vérité suprême, celle vigueur énergique, celte rapidité véhémente, ce noble orgueil qui sied si bien à la vertu calomniée, il poursuit son adversaire, il le presse, l’attaque par ses propres paroles, par ses propres sentimens, et le force, pour ainsi dire, k se condamner lui-même. L’indignation et la haine donnent k son style une impétuosité qu’il n’a point dans ses autres discours.

Eschine est plus lâche. Il y a chez lui beaucoup de raisonnemens qu’il aurait pu serrer davantage ; beaucoup de petites anecdotes qu’il raconte avec finesse, mais qui ne prouvent pas grand’chose contre Démosthène ; beaucoup de déclamations éloquentes sans doute, qui pouvaient faire impression sur le peuple, mais qui ne sont, dans la réalité, que des déclamations ; beaucoup de lieux communs très-beaux assurément, mais en effet étrangers à la cause, quoiqu’ils y soient amenés avec art.

Cette différence des deux harangues vicut du ^cuu ni