Page:Démosthène - Œuvres complètes, Auger, 1819, tome 1.djvu/429

Cette page a été validée par deux contributeurs.
413
PREMIÈRE PHILIPPIQUE.


Quelques-uns de nos nouvellistes répandent que Philippe trame avec Lacédémone la ruine de Thèbes et la destruction de tous les gouvernemens populaires ; d’autres disent qu’il a envoyé des ambassadeurs au Roi de Perse[1] ; d’autres, qu’il fortifie des places en Illyrie ; en un mot, chacun de nous s’en va débitant de côté et d’autre la nouvelle qu’il a inventée. Pour moi, je suis très-convaincu assurément qu’il est enivré de ses prospérités, et qu’il s’abandonne à ses songes ambitieux avec d’autant plus de confiance, qu’il ne voit personne qui lui résiste, et qu’il a le cœur enflé de ses succès ; mais je suis convaincu aussi qu’il ne se conduit pas de manière à laisser pénétrer ses desseins par les plus sottes gens de notre ville ; or, les plus sottes gens de notre ville, ce sont les nouvellistes. Mais si, laissant là toutes ces vaines conjectures, nous regardons comme une chose bien connue, que cet homme est notre ennemi ; qu’il nous dépouille de nos possessions ; que depuis long-temps il nous outrage ; que tous les secours, dont nous nous étions flattés, se sont tournés contre nous ; que désormais nous n’avons plus d’espoir et de ressource qu’en nous-mêmes ; et qu’en refusant aujourd’hui de porter la guerre dans la Macédoine, un jour, peut-être, nous serons forcés de la soutenir aux portes de notre ville ; si tout cela

  1. Au Roi de Parte, en grec, au Roi. Les Grecs appelaient le Roi de Perse le grand Roi, ou simplement le Roi.