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DISCOURS.

dans son génie et dans sa langue, de quoi atteindre à la perfection de l’éloquence. Le Français est naturellement vif, spirituel, capable de toutes les sciences ; il raisonne sur tous les objets avec autant d’agrément que de solidité. Son esprit, en général, n’est pas profond ; mais il est pénétrant, fin, délicat, juste et méthodique, quoique frivole en apparence ; attentif et réfléchi sans être lourd. La conversation des Français enchante tous les étrangers : aussi préfèrent-ils notre commerce à celui des autres peuples ; ils nous attirent chez eux, s’ils ne peuvent venir chez nous ; ils se plaisent en France plus qu’en aucun autre pays du monde ; ils accourent à l’envi dans notre capitale : Paris est l’Athènes de l’Europe[1].

La langue des Français, conforme à leur génie,

  1. Qu’on n’aille pas croire cependant, d’après ce que nous venons de dire, que la ressemblance entre les Athéniens et les Français soit parfaite. Il y avait dans les Athéniens, quoique naturellement gais et spirituels, un fonds de sérieux qu’on ne trouve pas ordinairement dans nos Français qui, en général, sont trop légers, et folâtres jusqu’à la bouffonnerie. Nous avions déjà beaucoup d’ouvrages excellens dans le genre gai et agréable, avant que d’avoir rien de supportable dans le genre grave et noble ; et il me semble que nos Français sont aussi inférieurs aux Grecs dans ce dernier genre, qu’ils leur sont supérieurs dans l’autre. Les beaux esprits de la France me paraissent avoir quelque chose de plus léger et de moins pédantesque que les beaux esprits de la Grèce. Je crois donc que les