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PRÉLIMINAIRE.

Cependant ce défaut d’action n’eût point convenu dans les orateurs de Rome et d’Athènes. Pourquoi ? ce n’est pas qu’ils eussent de plus grands sujets à traiter, mais c’est qu’ayant à déterminer, ou des citoyens, soit à prendre un parti comme utile, soit à le rejeter comme nuisible ; ou des juges, à absoudre tel homme comme innocent, à condamner tel autre comme coupable, et cela dans un temps marqué, il fallait une vivacité plus pressante, une action plus entraînante dans le style, dans la voix, dans le geste, et par conséquent plus de ce que j’appelle éloquence. Mais je ne doute nullement que nos grands prédicateurs, suivant qu’ils se proposaient d’opérer une détermination plus ou moins prompte, n’animassent plus ou moins leur discours et leur action.

Voici un exemple qui prouve invinciblement, je crois, les principes que j’ai établis. Saint Augustin prêchait à Hippone à la place de l’évêque Valère : cet homme illustre dans l’église, aussi recommandable par la sincérité de sa pénitence et par la sainteté de sa vie, que par son talent pour la parole, annonçait au peuple les grandes vérités de la religion, d’une manière solide, touchante, et presque toujours efficace. La fête Saint Léonce, évêque d’Hippone, étant proche, les habitans de cette ville, qui se livraient en ce jour à des excès d’intempérance, pensant honorer par la débauche les vertus d’un saint, murmuraient de ce qu’on voulait les empêcher de célébrer cette fête avec les


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