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DISCOURS.

On peut écrire ou parler avec intérêt, et même avec chaleur, sur une ou sur plusieurs vérités physiques, morales, politiques ; louer les talens et les vertus d’une façon noble et touchante, sans être pour cela orateur : on peut bien par-là en annoncer le génie ; mais ce n’est point là ce qui le caractérise.

Ainsi donc ces discours ou ces traités magnifiques, dans lesquels on raisonne sur les différentes manières de gouverner les peuples, sur les effets admirables de la nature, sur les causes de ses effets, sur les vertus de l’homme et sur ses vices, sur les qualités de son esprit et de son cœur, sur son état présent et sa destinée future, et sur d’autres matières importantes, ces discours, dis-je, et ces traités, peuvent annoncer un écrivain habile, qui sait user à propos des moyens les plus frappans de l’éloquence ; mais ils ne font pas l’orateur. Ils pourront déterminer les esprits ; mais comme on ne s’y propose pas de les déterminer sur-le-champ, ils n’ont point cette adresse qui gagne, ni cette rapidité qui entraîne ; adresse et rapidité qui sont les caractères propres de l’orateur.

Ces oraisons funèbres, où les morts sont loués pour instruire les vivans, où l’âme est élevée et transportée par la sublimité des pensées, par la noblesse des sentimens, par la grandeur des images, ne constituent pas encore l’orateur, tel que je le conçois, quoiqu’on y employe heureusement les grands moyens de l’éloquence, ceux par