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vant Dieu et les hommes, je me suis levé avec courage ; que la justice et la fidélité soient la ceinture de mes reins, et je raconterai l’occasion et la cause première et finale qui m’ont fait écrire cet autre livre, afin que ce soit pour moi un témoignage, dans les siècles à venir, que ma vie fut sans péché. »

Ainsi donc, lecteur bienveillant, écoute ceci et apprends ce qui suit : — Il y eut un homme illustre, d’une famille noble, un homme intègre et droit dans son siècle, marchant suivant la loi et les préceptes, qu’il gardait et observait, aimé de Dieu et honoré des hommes qui l’avaient placé à leur tête et à la tête de toutes choses sacrées. Il avait deux fils semblables à deux jeunes oliviers, honorés et aimés, connaissant à fond toutes sciences et pratiquant la sagesse. L’aîné, pour corriger son frère cadet, qui était enclin au jeu des cartes, se disputa avec lui, lui fit de la morale, et parfois le gronda et le frappa, sans que cela pût le faire changer. Aussi son frère éprouva contre lui une grande haine et ne put lui parler avec douceur ; enfin les deux frères devinrent deux mortels ennemis. Et quand le père eut appris cette affligeante querelle, son cœur en fut navré de douleur ; et venant à moi plein d’horreur et d’indignation, il me raconta le malheur qui venait de lui arriver ; et tout en pleurant il me supplia d’éteindre cette haine et cette dissension entre deux frères, et il me dit : « Ce sont mes