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qui sont la base même de la société, laissons de côté le long martyrologe des mauvais traitements que des maîtres brutaux infligeaient chaque jour à leurs esclaves. C’est chez celui qu’avant la guerre on appelait un bon propriétaire qu’il faut étudier la prétendue perfection morale de l’esclavage pour en connaître toute la flagrante immoralité. Ce propriétaire a les mêmes principes que nous, mais il est bien obligé d’obéir à la nécessité. Il sait la protection et le respect dus à la famille ; mais, comme la population noire, dans les États où elle cultive le sucre et le coton, ne se reproduit pas assez vite pour suffire aux exigences de cette exploitation, il va acheter un contingent de jeunes ouvriers sur les marchés de la Virginie. Sans doute, après les avoir ainsi arrachés à leurs parents, à leurs affections et au sol qui les a vus naître, il ne brisera pas les liens nouveaux qui se forment sous ses yeux, mais c’est qu’administrateur économe, il trouve dans leur fécondité une source directe de revenus. Il ne veut pas humilier, faire souffrir par d’inutiles punitions ; mais il faut châtier le nègre qui a manqué à ses devoirs, et ces devoirs sont l’obéissance et le travail. Le nègre doit oublier qu’il est homme pour se souvenir seulement qu’il est esclave, et travailler sans choix d’ouvrage, sans rému-