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le moindre obstacle retardait sa marche. À chaque rivière profonde, il fallait décharger toutes les voitures et les faire flotter, pour les tirer avec une corde sur l’autre rive, puis transporter les provisions à bras sur les ponts destinés à l’infanterie et composés, comme des radeaux, de troncs d’arbres liés ensemble. Après deux mois de voyage, les Américains avaient, au milieu de novembre, atteint les hautes passes des montagnes Rocheuses, lorsqu’un hiver précoce vint les y surprendre. Enveloppés dans une tourmente de neige, les animaux périrent de froid et de faim. Chaque jour réduisait leur nombre de plusieurs centaines les soldats grelottant mettaient le feu aux voitures, abandonnées avec les vivres précieux qu’elles portaient. Pendant quinze jours, cette petite troupe, jonchant des débris de son convoi le manteau glacé du désert, continua cette marche terrible avec plus de persévérance que de prudence. Mais elle ne put parcourir que quatorze lieues, au bout desquelles elle s’arrêta épuisée et fut réduite à prendre ses quartiers d’hiver dans la triste contrée où elle se trouvait bloquée. La plupart des vivres ayant été perdus, on vécut de viande de mulet. Enfin, cette ressource suprême venant à manquer, le capitaine Marcy, qui depuis devint général fédéral, se dévoua à la périlleuse entre-