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rente de celle de la modeste chambre qui avait vu l’éclosion de ses rêveries utopiques, ou de l’ambiance des cabarets et des salles de jeu où il avait sacrifié sa jeunesse, sa santé et l’héritage paternel, Cyrano se décide à dédier au noble duc, en novembre 1653, la Mort d’Aggrippine et ses Œuvres diverses. Louis d’Arpajon se garda d’y jeter un coup d’œil, autrement il eût été marri de s’être si lourdement trompé sur l’orthodoxie de son protégé, aussi fit-il grandement les choses.

La Mort d’Agrippine et les Œuvres diverses, grossies du Pédant joué, virent le jour sous la forme de deux beaux volumes in-quarto achevés d’imprimer à quelques jours d’intervalle (mai 1654). Le premier possédait un frontispice gravé dont la moitié supérieure était occupée par les armes d’Arpajon, et, dans le second, les mêmes armes formaient bandeau au-dessus de l’épître dédicatoire ; quelques exemplaires furent tirés sur grand papier. Un délicieux sonnet à Jacqueline d’Arpajon ouvrait les Œuvres diverses :

Le vol est trop hardi que mon cœur se propose
Il veut peindre un soleil par les Dieux animé,
Un visage qu’Amour de ses mains a formé
Où des fleurs du Printemps la jeunesse est éclose.

Une bouche où respire une haleine de rose
Entre deux arcs flambans d’un corail allumé,
Un balustre de dents en perles transformé.
Au devant d’un palais où la langue repose :

Un front où la pudeur tient son chaste séjour
Dont la table polie est le trône du jour ;
Un chef-d’œuvre où s’est peint l’Ouvrier admirable :

Superbe, tu prétends par dessus tes efforts !
L’éclat de ce visage est l’éclat adorable.
De son âme qui luit au travers de son corps.