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Mais voici le dernier choc et le plus violent dont ils prétendent obscurcir la splendeur de sa gloire. « Il est, disent-ils, auteur du Siège de Paris. » Je leur réponds en premier lieu, qu’il l’a dû conseiller, la Reine Régente ayant été avertie de plusieurs complots qui se brassoient contre la personne du Roi. Cependant le bruit même commun tombe d’accord qu’il n’a pas été le premier à prêter sa voix pour la résolution de cette entreprise, et qu’au contraire on l’a toujours blâmé d’avoir pris des voies trop penchées à la douceur. De plus, pourquoi vouloir qu’il ait ordonné lui seul l’enlèvement de notre jeune Monarque ? Les gens du métier savent qu’il n’est pas seul dans le Conseil, et qu’il n’y porte son opinion que comme un autre. Bien loin donc d’avoir été le seul auteur de ce dessein, il n’a pas même souffert qu’on exécutât contre la Ville les choses qui sans doute eussent hâté sa réduction, parce qu’elles semblèrent à son naturel humain un peu trop cruelles : Et si les Parisiens me demandent quelles sont ces choses, je leur ferai connoître qu’il pouvoit, par exemple, avec beaucoup de justice, faire punir de mort les prisonniers de guerre en qualité de traîtres et de rebelles à leur Roi. Il pouvoit d’ailleurs en une nuit, s’il l’eût voulu, avec l’intelligence qu’il avoit au dedans, faire saccager et brûler les Faux-bourgs qui n’étoient que fort foiblement gardés ; chasser les fuyards dans la Ville pour l’affamer, ou bien les passer au fil de l’épée à l’exemple de Henri IV, qui fit des veuves en moins d’un jour de la moitié des femmes de Paris, et diminuer par cette saignée la fièvre des Habitants. Mais au lieu de ces actes d’hostilité, il défendit même d’abattre les Moulins qui sont autour de la Ville, quoiqu’il sût que par leur moyen elle recevoit continuellement force blés ; et encore qu’il eût avis de toutes les marches de leurs Gens de guerre, il faisoit souvent détourner les Troupes