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Mais moy (Grand est !) point ne fais compliment,
Car moy ne peux ; ains diray seulement
Qu’il n’est plus vray qu’aprentif n’est pas maistre,
Puisque ton coup d’essay me fait connoistre,
Que moy n’ay pas assez d’entendement
__________Pour te louër.

Après le Pédant joué, Cyrano commence l’Autre Monde. Son état d’esprit (nous le connaissons grâce à Le Bret), se résume en une ligne : l’horreur de toute sujétion morale ou matérielle :


… Au reste, il ne bornait pas sa haine pour la sujétion à celle qu’exigent les Grands auprès desquels on s’attache, il l’étendait encore plus loin et même jusqu’aux choses qui lui semblaient contraindre les pensées et les opinions dans lesquelles il voulait être aussi libre que dans les plus indifférentes actions, et il traitait de ridicules certaines gens qui avec l’autorité d’un passage ou d’Aristote, ou de tel autre, prétendent aussi audacieusement que les disciples de Pythagore, avec leur Magister dixit, juger des questions importantes, quoique des épreuves sensibles et familières les démentent tous les jours…

Démocrite et Pyrrhon lui semblaient, après Socrate, les plus raisonnables de l’antiquité, encore n’était-ce qu’à cause que le premier avait mis la vérité dans un lieu si obscur qu’il était impossible de la voir, et que Pyrrhon avait été si généreux, qu’aucun des savants de son siècle n’avait pu mettre ses sentiments en servitude, et si modeste qu’il n’avait jamais voulu rien décider ; ajoutant à propos de ces Savants que beaucoup de nos modernes ne lui semblaient que les échos d’autres Savants et que beaucoup de gens passent pour très doctes qui auraient passé pour très ignorants si des Savants ne les avaient précédés…


Gardons-nous de prendre à la lettre ce plaidoyer de Le Bret. Cyrano n’attachait d’importance qu’à ses propres conceptions ou plutôt à celles qu’il tâchait de rajeunir en se les assimilant. Ainsi la Cité du Soleil (en latin), de Campanella, la traduction récente par Samuel Sorbière