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demeure plus de temps que nous au ventre de sa mère ; et par conséquent il y reçoit des coctions ou plus parfaites, ou plus nombreuses ! » Je réponds qu’il ne s’ensuit pas, car sans m’appuyer des observations que tant de doctes ont faites sur l’énergie des nombres, quand ils prouvent que toute matière étant en mouvement, certains êtres s’achèvent dans une certaine révolution de jours qui se détruisent dans un autre ; ni sans me faire fort des preuves qu’ils tirent, après avoir expliqué la cause de tous ces mouvemens, que le nombre de neuf est le plus parfait ; je me contenterai de répondre, que le germe de l’homme étant plus chaud, le Soleil y travaille, et finit plus d’organes en neuf mois, qu’il n’en ébauche en un an dans celui du poulain. Or qu’un cheval ne soit beaucoup plus froid qu’un homme, on n’en sauroit douter, puisque cette bête ne meurt que d’enflure de rate, ou d’autres maux qui procèdent de mélancolie. « Cependant, me direz-vous, on ne voit point dans notre Monde aucun homme engendré de boue, et produit de cette façon ? » Je le crois bien, votre Monde est aujourd’hui trop échauffé ; car sitôt que le Soleil attire un germe de la Terre, ne rencontrant point ce froid humide, ou pour mieux dire ce période certain d’un mouvement achevé qui le contraigne à plusieurs coctions, il en forme aussitôt un végétant ; ou s’il se fait deux coctions, comme la seconde n’a pas le loisir de s’achever parfaitement, elle n’engendre qu’un insecte. Aussi j’ai remarqué que le Singe, qui porte comme nous ses petits près de neuf mois, nous ressemble par tant de biais, que beaucoup de Naturalistes ne nous ont point distingué d’espèce ; et la raison c’est que leur semence à peu près tempérée comme la nôtre, pendant ce temps a presque eu le loisir d’achever les trois digestions.

« Vous me demanderez indubitablement de qui je tiens