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inquiétudes que vous causent les caprices d’une bête. En vérité, Messieurs, si vous rencontriez un homme d’âge mûr qui veillât à la police d’une fourmilière, pour tantôt donner un soufflet à la fourmi qui auroit fait choir sa compagne, tantôt en emprisonner une qui auroit dérobé à sa voisine un grain de blé, tantôt mettre en justice une autre qui auroit abandonné ses œufs, ne l’estimeriez-vous pas insensé de vaquer à des choses trop au-dessous de lui, et de prétendre assujettir à la raison des animaux qui n’en ont pas l’usage ? Comment donc, vénérables Pontifes, appellerez-vous l’intérêt que vous prenez aux caprices de ce petit animal ? Justes, j’ai dit. »

Dès qu’il eut achevé, une sorte de musique d’applaudissements fit retentir toute la salle ; et après que toutes les opinions eurent été débattues un gros quart d’heure, le Roi prononça :

« Que dorénavant je serois censé homme, comme tel mis en liberté, et que la punition d’être noyé seroit modifiée en une amende honteuse (car il n’en est point en ce pays-là « d’honorable ») ; dans laquelle amende je me dédirois publiquement d’avoir soutenu que la Lune étoit un Monde, à cause du scandale que la nouveauté de cette opinion auroit pu apporter dans l’âme des foibles. »

Cet Arrêt prononcé on m’enlève hors du Palais, on m’habille par ignominie, fort magnifiquement, on me porte sur la tribune d’un magnifique Chariot ; et traîné que je fus par quatre Princes qu’on avoit attachés au joug, voici ce qu’ils m’obligèrent de prononcer aux carrefours de la Ville :

« Peuple, je vous déclare que cette Lune-ci n’est pas une Lune, mais un Monde ; et que ce Monde là-bas n’est pas un Monde, mais une Lune. Tel est ce que les Prêtres trouve bon que vous croyiez. »