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Traité pour son grand âge, avec la déférence
Que ses concitoyens accordent aux vieillards,
Comme aux prêtres, comblés de respect et d’égards:
Car, si les uns du feu sacré gardent la flamme,
Les autres sont gardiens des vrais trésors de l’âme.
Certes le vieux Lutas haïssait les croisés.
Mais il dut obéir aux ordres, imposés
Par le prince Marghier, et soigner le beau page.
Ses malheurs, sa jeunesse et surtout son courage
Désarmèrent son cœur, bien qu’hostile aux Germains
Le rendant en effet moins dur et plus humain.
Séduit par le charmant jeune homme, il s’intéresse
A son profond chagrin sans pleurs, à sa tristesse,
Et, voulant le distraire, il lui fait des récits
De guerre et de combats, ses sujets favoris.
Tous les autres guerriers lui tiennent compagnie,
Et font à l’étranger un accueil gracieux;
Même le chef Marghier, dont la Lithuanie
Admire et craint l’esprit austère et sérieux,
Oublie, en le voyant, l’offrande sanguinaire;
Il l’admet à sa table, offrant au prisonnier
Du pain fait de froment, du porc frais, de la bière,
Et renonce à remplir son projet meurtrier.