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turelle. Personne n'avait porté plus loin la sagacité dans l'observation ; personne n'avait rendu la nature plus intéressante, par la sagesse et l'espèce de prévoyance de détail dont il avait trouvé des preuves dans l'histoire des plus petits animaux. Ses mémoires sur les insectes, quoique diffus, étaient clairs, élégants, et pleins de cet intérêt qui vient de la curiosité sans cesse piquée par des détails nouveaux et singuliers ; ils avaient commencé à répandre parmi les gens du monde le goût de l'étude de la nature.

Ce ne fut pas sans quelque chagrin que Réaumur se vit éclipsé par un rival dont les vues hardies et le style magnifique excitaient l'enthousiasme du public et lui inspiraient une sorte de mépris pour des recherches en apparence aussi minutieuses que celles dont les insectes sont l'objet. Il témoigna sa mauvaise humeur d'une manière un peu vive[1] ; on le soupçonne même d'avoir contribué à la publication de quelques lettres critiques[2], ou l'on voulait opposer à l'éloquence du

  1. Voyez, dans le volume des Mémoires de l'Académie pour 1746, p. 483, lequel n'a paru qu'en 1751, un Mémoire de Réaumur Sur la manière d'empêcher l'évaporation des liqueurs spiritueuses dans lesquelles on veut conserver des objets d'histoire naturelle. Il s'y plaint violemment ce que Daubenton avait publié, dans le tome III de l’Histoire naturelle, un extrait de ce Mémoire avant qu'il fût imprimé.
  2. Lettres à un Américain, sur l'Histoire naturelle générale et particulière de M. de Buffon, première partie, Hambourg (Paris), 1751 ; seconde, troisième parties, ibid., cod. ann. C'est dans la neuvième lettre de cette troisième partie qu'on montre le plus l'intention de défendre Réaumur contre Buffon. — Lettres, etc., sur l'Histoire naturelle de M. de B. et sur les observations microscopiques de M. Needham, quatrième partie, ibid., cod. ann. C'est dans la dixième lettre que l'on critique Daubenton sur l'arrangement du Cabinet du Roi, et qu'on lui oppose celui de M. de Réaumur. Cinquième partie, même titre et même année. Puis, Suite des lettres, etc., sur les quatrième et cinquième vol. de l'Hist. nat. de M. de Buffon, et sur le Traité des animaux de M. l'abbé de Condillac, sixième partie, Hambourg, 1756. Le titre et la date restent les mêmes pour la septième, la huitième et la neuvième partie, qui est la dernière.
    L'auteur, ex-oratorien, natif de Poitiers, se nommait l'abbé Delignac ; il était très-lié avec Réaumur. On a encore de lui , Mémoires pour l'histoire des araignées aquatiques, etc.