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changement de séjour, loin de les soulager, ne lit qu’ajouter à ses souffrances physiques des maux plus insupportables, des chagrins et des soucis de tout genre.

L'impératrice, avertie du désir que M. Pallas montrait d’habiter la Tauride, lui fit, avec beaucoup de grâce, présent de deux villages situés dans le plus riche canton de la presqu’île, d’une grande maison dans la ville d’Achmetchet, nommée par les Russes Sympheropol, qui était alors le chef-lieu du pays, et d’une somme considérable pour son établissement.

M. Pallas s’y rendit à la fin de 1795 ; mais ce climat, qui lui avait paru si beau lors d’un court passage, se montra à la longue inconstant et humide. Des marécages en rendent les belles vallées pestilentielles en automne ; l’hiver y est très-rude : on y éprouve les incommodités du nord et du midi. De plus, des biens donnés un peu légèrement, parce qu’on les croyait entièrement dépendants de l’ancien domaine des khans de Crimée, se trouvèrent en partie litigieux, et occasionnèrent au nouveau titulaire des procès interminables. Enfin, et par-dessus tout, M. Pallas n’avait pas assez prévu quel vide il éprouverait lorsque, éloigné de tous les hommes instruits, il se verrait dans l'impossibilité de communiquer ses idées. Bientôt détrompé, il exprima déjà son chagrin avec amertume dans la préface du deuxième volume de son second Voyage.

Il a cependant passé en Crimée quinze années presque entières, occupé de continuer ses grands ouvrages, et d’exercer envers les étrangers l'ancienne hospitalité du pays ; travaillant surtout à un projet fort important