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tre tribu, qui jeta, sous Gengis-Khan, dans le onzième siècle, les bases de la domination la plus formidable qui ait encore existé sur la terre. La Chine, l'Inde, la Perse, toute la Tartarie, leur furent successivement soumises ; ils rendirent la Russie tributaire, et tirent des irruptions en Pologne et en Hongrie. Mais, après quelques siècles, la fortune leur devint contraire : chassés de la Chine et de la Perse, détruits dans l'Inde, soumis aux Russes dans les parties occidentales de leurs anciennes conquêtes, et aux Chinois dans leur pays originaire, ils n’ont conservé d’établissements indépendants que dans quelques cantons de l'ouest de la mer Caspienne. Rendus à la vie pastorale, la plupart errent, comme leurs ancêtres, dans ces immenses déserts du centre de l’Asie, attendant que la discorde ou l’affaiblissement des empires voisins permette à quelque aventurier entreprenant de les rassembler pour de nouvelles conquêtes. C’est ce que la Chine et la Russie cherchent à empêcher, en les divisant, en réduisant leur nombre, en les transplantant quelquefois à des distances énormes quand ils se mutinent. Et toutefois, dans cet état de sujétion, ces malheureux conservent l’orgueil des rangs et de la noblesse ; ils ont de longues généalogies : leurs chefs cabalent les uns contre les autres, et briguent à la cour de leurs suzerains des augmentations d’autorité. Le grand Lama, qui gouverne les consciences de tous ces peuples par une hiérarchie presque calquée sur celle de l’Église romaine, donne à cette autorité un caractère sacré par ses patentes, qui deviennent ainsi pour lui un moyen