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tière. M. Cavendish, devenu millionnaire, en fut quitte pour quelques signes de plus, qui indiquaient ce que l'on devait faire de l'excédant de son revenu ; encore fallait-il, pour les obtenir, que son banquier le pressât à plusieurs reprises. On dit qu'il vint un jour lui dire qu'il avait laissé accumuler jusqu'à 1,800,000 fr., et qu'il ne pouvait plus sans honte garder une si forte somme en simple dépôt ; ce qui prouve assurément autant de délicatesse d'un côté, que d'insouciance de l'autre. Cependant on dit que de signes en signes, et de placements en placements, M. Cavendish a fini par laisser trente millions. Peu de savants ont été aussi riches, et peu de riches le sont devenus comme lui, à force de ne pas songer qu'ils l'étaient. Cette cause de la grandeur de sa fortune en est aussi l'excuse ; car nous conviendrons qu'on a presque besoin d'être excusé quand on acquiert tant de bien. M. Cavendish ne laissait pas de chercher aussi des occasions de diminuer le sien : il a soutenu et avancé plusieurs jeunes gens qui annonçaient des talents ; il a créé une grande bibliothèque et un cabinet de physique très-riche, qu'il avait consacrés si complètement au public, qu'il ne se réservait aucun privilège, empruntant ses propres livres avec les mêmes formalités que les étrangers, et s'inscrivant comme eux sur le registre du bibliothécaire. Un jour le gardien de ses instruments vint lui dire avec humeur qu'un jeune homme avait cassé une machine très-précieuse. Il faut, répondit-il, que les jeunes gens cassent des machines pour apprendre à s'en servir ; faites en faire une autre.