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qui, par là, n'en acquéraient que plus d'énergie et de profondeur.

C'est dès lors, en effet, que son esprit commence à s'ouvrir de nouvelles routes. C'est dès lors qu'à la vue de quelques térébratules, déterrées près de Fécamp, il conçoit l'idée de comparer les espèces fossiles aux espèces vivantes ; c'est dès lors que la dissection de quelques mollusques lui suggère cette autre idée d'une réforme à introduire dans la distribution méthodique des animaux ; en sorte que, comme il le dit encore lui-même, les germes de ses deux plus importants travaux, la comparaison des espèces fossiles aux espèces vivantes, et la réforme de la classification du règne animal, remontent à cette époque.

C'est de cette époque que datent aussi ses premières relations avec M. Tessier, que les orages de la révolution retenaient alors à Fécamp, et qui depuis quelque temps y occupait l'emploi de médecin en chef de l'hôpital militaire.

M. Tessier ne put voir le jeune Cuvier sans être frappé de l'étendue de son savoir. Il l'engagea d'abord à faire un cours de botanique aux médecins de son hôpital ; il écrivit ensuite à tous ses amis de Paris pour leur faire part de l'heureuse découverte qu'il venait de faire. Il en écrivit surtout à ses amis du Jardin des Plantes ; qui eurent aussitôt l'idée d'y appeler et d'y attacher le jeune Cuvier, en qualité de suppléant de Mertrud, chargé de l'enseignement de l’anatomie comparée.

« Je me suis sans cesse rappelé, dit à cette occasion M. Cuvier, je me suis sans cesse rappelé une phrase de M. Tessier dans sa lettre à M. de Jussieu. Vous vous souvenez, disait-il, que c'est moi qui ai donné Delambre à l'Académie : dans un autre genre, ce sera aussi un Delambre. »

C'est donc à M. Tessier que l'Académie et les sciences ont dû Delambre et Cuvier. Un homme qui, d'ailleurs, n'aurait rendu que ces deux services aux sciences devrait compter à jamais sur le respect et sur la reconnaissance de tous ceux qui les cultivent. Mais combien de pareils traits touchent plus vivement notre âme quand ils ornent une vie consacrée tout entière aux sciences, à leurs progrès, à leurs applications, et qui