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qu'il était réservé de porter le premier un œil vraiment observateur sur ces ceintures hérissées qui entourent le globe, et où les substances qui composent le noyau de notre planète se montrent au physicien ; de faire connaître avec détail la nature de ces substances, leur ordre ou plutôt le désordre qu'y ont mis les catastrophes qui les ont ainsi entassées ; de jeter enfin quelque lumière sur les événements qui ont précédé l'état actuel du monde ; et sur lesquels on n'avait presque avant lui que les idées les plus vagues ou les systèmes les plus hasardés.

Il en avait eu en quelque sorte la vocation avant l'âge de vingt ans ; car dès 1760 il avait essayé, sur les pas de quelques Anglais, de s'élever aux glaciers de Chamouny. Les idées que cette tentative lui donna, se développèrent dans un voyage qu'il fit en France et en Angleterre, en 1768, et dans un autre où il parcourut toute l'Italie en 1772. Les naturalistes qu'il fréquenta, les cabinets qu'il visita, les contrées montagneuses qu'il traversa, tout lui rappela combien sa propre patrie était féconde en instruction sur l'un des sujets les plus intéressants qui puissent captiver l'esprit humain. Il forma dès lors le projet de s'attacher invariablement à cette recherche, et toutes ses courses, tous ses travaux, ses plus ingénieuses découvertes même, s'y Rapportèrent plus ou moins directement.

Pour mieux saisir l'importance de ce qu'a fait de Saussure en ce genre, il faut se rappeler l'état où se trouvait alors la théorie de la terre.

Les naturalistes du seizième et du dix-septième siècle