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riées, et à peindre tant de personnages divers, d'une manière également juste et frappante.

Ce qu'une observation un peu plus attentive y fait remarquer, avec peut-être plus de plaisir encore, c'est la même sagacité d'observation, la même finesse de rapprochements, le même art de comparer, de subordonner, de remonter à ce que les faits ont de plus général, porté dans un autre champ ; et, par-dessus tout, ces traits lumineux, profonds, qui saisissent tout à coup le lecteur, et le transportent dans un grand ordre d'idées.

M. Cuvier semble avoir été destiné à donner un nouveau, caractère à tous les genres qu'il a cultivés. C'est lui qui a porté dans l'enseignement de l'histoire naturelle ces vues philosophiques et générales qui jusque-là n'y avaient point pénétré encore.

Dans ses éloquentes leçons, l'histoire des sciences est devenue l'histoire même de l'esprit humain ; car, remontant aux causes de leurs progrès et de leurs erreurs, c'est toujours dans les bonnes ou mauvaises routes, suivies par l'esprit humain, qu'il trouve ces causes.

C'est là qu'il met, pour me servir d'une de ses expressions pleine de force, c'est là qu'il met l'esprit humain en expérience ; démontrant, par le témoignage de l'histoire entière des sciences, que les hypothèses les plus ingénieuses, que les systèmes les plus brillants ne font que passer et disparaître, et que les faits seuls restent ; opposant partout aux méthodes de spéculation, qui n'ont jamais produit aucun résultat durable, les méthodes d'observation et d'expérience auxquelles les hommes doivent tout ce qu'ils possèdent aujourd'hui de découvertes et de connaissances.

Eh ! dans quelle bouche ces grands résultats tirés de l'histoire des sciences, cette théorie expérimentale de l'esprit humain, si je puis ainsi dire, auraient-ils pu avoir plus d'autorité que dans la sienne ? Qui s'est montré plus constamment attaché à l'observation, à l'expérience, à l'étude rigoureuse des faits, et qui néanmoins a jamais enrichi son siècle de vérités plus neuves et plus sublimes ?