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Celte échelle immense, commençant aux substances les plus simples et les plus brutes, s'élevant par des degrés infinis aux minéraux réguliers, aux plantes, aux zoophytes, aux insectes, aux animaux supérieurs, à l'homme enfin, et par lui aux intelligences célestes, et se terminant dans le sein de la divinité ; cette gradation régulière dans le perfectionnement des êtres, présentée avec le talent de Bonnet, formait un tableau enchanter qui dut gagner beaucoup d'esprits et avoir beaucoup de partisans.

Pendant longtemps les naturalistes s'appliquèrent à remplir les vides que le défaut d'observations laissait encore selon eux dans cette échelle, et la découverte d'un chaînon de plus dans cette immense série leur paraissait ce qu'ils pouvaient trouver de plus intéressant.

Mais, quelque agréable que cette idée puisse paraître à l'imagination, il faut avouer que, prise dans cette acception et dans cette étendue, elle n'a rien de réel. Sans doute les êtres de certaines familles se ressemblent plus ou moins entre eux ; sans doute il en est dans quelques-unes qui partagent certaines propriétés des familles voisines : la chauve-souris vole comme les oiseaux, le cygne nage comme les poissons ; mais ce n'est ni au dernier quadrupède, ni au premier oiseau, que la chauve-souris ressemble le plus. Le dauphin lierait les quadrupèdes aux poissons encore mieux que le cygne n'y rattacherait les oiseaux. Ainsi il y a des rapports multipliés, mais point de ligne unique ; chaque être est une partie qui exerce sur le tout une influence déterminée,