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Lorsque la tournure que prenait la révolution détermina les tantes de Louis XVI à quitter la France, M. Lassus, à qui dix ans de célébrité avaient rendu toute leur confiance, n'hésita pas un instant à les suivre : non qu'il espérât conserver pendant son absence les places qu’il occupait à Paris, ni qu'il ignorât les projets que l'on avait déjà contre les émigrés ; mais, ce qu'il voyait encore mieux, c'était le malheur des princesses et le besoin qu'elles pouvaient avoir de ses secours dans un voyage si pénible.

Le temps où nous vivons a produit plus de mutations qu'aucun autre dans la fortune et dans le pouvoir, et par conséquent il a donné plus de sujet qu'aucun autre d'exercer avec éclat la vertu de la fidélité ; mais les exemples n'en ont pas été si communs que les occasions, et il n'est pas encore devenu inutile de publier ceux que l'on rencontre.

M. Lassus parcourut avec Mesdames une partie de l'Italie, et séjourna quelque temps à Rome. Il observa les beautés de la nature et les chefs-d'œuvre anciens et modernes, en homme qui ne manquait ni de goût ni d'imagination ; mais il ne cessa point pour cela d'étudier l'art où il était déjà si habile. Il suivit dans les hôpitaux toutes les pratiques avantageuses, se lia avec les plus fameux maîtres, et fit des extraits ou des traductions des meilleurs ouvrages de chirurgie italiens.

Bien lui prit de s'être ainsi occupé, car ses portefeuilles furent à son retour la seule défense qu'il pût opposer à la loi contre les émigrés : c'était, disait-il,